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22 février 2011

Bouillottes

de Éric Halphen

La douleur. Difficile d'en parler, de la douleur. De ce voile autoritaire qui vous enveloppe en douce, vous anéantit plus sûrement que le plus puissant des anesthésiants ; qui fait de vous un pantin désarticulé et languissant se prenant en permanence les pieds dans les fils troublés du destin.

Douleur de ma mère, massacrée autant par ces incapables de médecins que par le mal mystérieux qui la diminuait jour après jour, de moins en moins mère, elle était, de moins en moins femme à mesure qu'elle devenait patiente. Patiente. Drôle de mot. Pour ne pas dire passive. Consentante.

Douleur de mon père, impuissant et maladroit face au lancinant cataclysme. Douleur mienne, enfin. Moi. Dont Maud avait dit que je ne savais pas aimer. Elle a sans doute raison, Maud, mais est-ce parce qu'on ignore l'amour qu'on repousse pour autant le chagrin ? Question sans réponse.

À présent, il s'agit de me secouer. Quitter mon lit et ses bouillottes tentantes. Se laisser envahir par la haine, sorte de sorcière voluptueuse et irrésistible. Émerger de la confortable torpeur. Et agir. Seule cette idée me soutient maintenant. Pour qu'enfin s'inverse le cours de l'histoire et s'accomplisse ma mission, régler les comptes.

Engeance de la vengeance : j'en fais partie. Alors, en route. Sur ma moto, j'aspire l'asphalte à larges lampées libérées. Mais Dieu que c'est lourd un flingue.

Éditions GALLIMARD

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